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FanFan2 : la fiction à l’eau de rose numérique

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En octobre dernier Alexandre Jardin se lançait avec FanFan 2 dans une expérience de récit transmédia, en partenariat avec Orange. Après avoir publié le roman à succès FanFan puis sa suite, 15 ans après, FanFan 2, l’auteur prolonge la fiction au-delà du livre dans un récit participatif et multi-écran qui doit se poursuivre jusqu’en mai 2011.

Publié en 1990 et adapté au cinéma trois ans plus tard, le roman FanFan raconte la cour sans fin d’Alexandre pour FanFan. Dans 15 ans après, FanFan 2, le couple se retrouve et Alexandre tente de rallumer chaque jour la flamme avec son amour de jeunesse. À la suite de ce second roman, l’auteur décide de poursuivre le récit en faisant appel aux lecteurs pour aider le personnage dans son aventure. Mais, comment repenser la fiction et comment organiser le récit avec les outils numériques ? À l’occasion d’un événement organisé à La Cantine (ffdeux) le 4 janvier dernier, Silicon Maniacs dresse un premier bilan d’étape de cette expérience.

Multiplication des portes d’entrée ?

Avec Orange, Alexandre Jardin a imaginé un dispositif multi-écran : les lecteurs – et surtout les lectrices – sont invités à suivre en temps réel le récit sur le site web Fanfan2, sur Twitter, sur Facebook et via des applications iPhone (et prochainement sur iPad). L’histoire se construit autour des messages postés sur les comptes des personnages sur les réseaux sociaux, de leurs échanges de mail, de sms… Mais comment créer du sens et conserver une unité dans un récit qui se construit simultanément dans plusieurs univers ?

Initialement, le coeur de l’expérience devait être le site internet et l’application iphone (en version gratuite et payante, à 1,49€), qui centralisent les échanges entre les différents personnages. Cependant, elle s’est rapidement déportée sur Facebook, au point d’éclipser les autres portes d’entrée dans l’expérience. « Il y a un tel besoin de participation des lecteurs qu’il n’est pas possible de poursuivre le récit en dehors de Facebook », analyse l’auteur. D’un côté, le téléphone mobile ne répond pas suffisamment aux attentes des lectrices, dans la mesure où les interactions qu’il permet restent limitées. De l’autre, Twitter a été plus pensé par les concepteur du projet comme un espace de publication, que comme un lieu d’échange. « Le Numérique n’existe pas. Si on devait repartir de zéro, il faudrait repartir sur une offre infiniment plus spécifique à chaque appareil », reconnaît Alexandre Jardin avant de poursuivre : « les sites internet, c’est un peu le vieux web. La suite de l’expérience sera encore plus tourné vers les réseaux sociaux. »

Une fiction en temps réel ?

FanFan 2 fait le pari d’un récit ouvert et construit au jour le jour. Contrairement au livre dans lequel l’histoire est figée, la fiction se poursuit ici en temps réel au gré des interactions entre les personnages et avec les lecteurs. Mais comment transférer dans la réalité la vie d’un personnage fictif ? « Ce n’est plus un livre, c’est un flux », résume Alexandre Jardin. L’importance prise par Facebook dans le dispositif a profondément marqué le récit. A travers leurs profils Facebook, les personnages s’immiscent dans la vie des lecteurs. Ils deviennent des utilisateurs lambda du réseau social. On suit les pérégrination des héros du roman, comme celles de n’importe lequel de ses amis à travers leurs statuts et les messages qu’ils postent.

La notion de temps réel dès lors est biaisée. Le dispositif se rapproche alors de celui d’un feuilleton avec des épisodes quotidiens. L’histoire est rythmée par des rendez-vous : les prises de parole des personnages sur les réseaux sociaux.

Participation ou interactivité ?

Succès en librairie et au cinéma, FanFan réunit une communauté de fans. Au-delà du récit, c’est la possibilité d’entrer en contact avec le personnage et son auteur qui mobilise la communauté de lectrices autour de l’expérience. Dès l’origine, Alexandre Jardin a cultivé une certaine ambiguïté en donnant son propre prénom à son héros. Facebook permet aux lectrices d’échanger avec les personnages, de les interpeller, de participer à l’aventure et, par extension, de se rapprocher de l’auteur. Le dispositif exacerbe cette confusion entre le réel et le virtuel, au point que certaines lectrices opèrent un « véritable transfert un peu inquiétant », commente Alexandre Jardin.

Mais FanFan2 est-elle véritablement une expérience participative ? Chaque jour, Alexandre cherche une nouvelle idée pour ré-enchanter son quotidien avec FanFan. Il sollicite ainsi les conseils et les idées des lecteurs. L’auteur reste cependant le seul maître de l’histoire et de son scénario. C’est lui seul qui sélectionne et met en oeuvre dans le récit les suggestions des internautes, avant de les publier dans son livre de « recettes ». Malgré toute la dimension participative du dispositif sur Facebook, les lecteurs restent cantonnés au rang de spectateurs. Ils n’intègrent pas le récit et n’accèdent pas au rang de personnage secondaire de l’histoire. Plus que participative, l’expérience reste surtout interactive.

Comment impliquer les lecteurs si ils ne participent pas directement au récit ? L’ambition initiale des concepteurs du dispositif était d’inviter les lecteurs dans un jeu, en leur proposant eux aussi de relever les défis d’Alexandre, avec leurs partenaires et leurs amis. L’expérience a cependant évolué dans un autre sens. « Cette dimension ludique ne répondant pas à leur attentes », reconnaît Stéphane Adamiak, de la division contenus d’Orange. Pourtant, selon lui, le taux de participation sur la page Facebook du personnage principal (850 fans) peut atteindre le chiffre impressionnant de 20 %. Les lecteurs ont naturellement endossé le rôle de garants de l’intégrité de l’oeuvre et de son ADN. Si les lecteurs ne participent pas directement à l’histoire, ils interviennent le plus souvent en réaction au récit. « Dès qu’Alexandre est sur le point de tromper Fanfan, il y a une forte de levée de bouclier. Le héros représente la fidélité éternelle. Dès qu’il sort de son personnage, il soulève une colère noire de la part des lecteurs. Il est lynché dans les commentaires », explique Alexandre Jardin.

Illustration : capture d’écran du film FanFan 1993, réalisé par Alexandre Jardin, avec Sophie Marceau (Fanfan) Vincent Pérez (Alexandre) et captures d’écran de la page Facebook d’Alexandre 2.


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